vendredi 2 novembre 2007

De l'élégance...



Tout est affaire de bon goût au Moyen-Orient, on le sait... Je vous laisse le soin de juger par vous-mêmes des qualités indéniables du sympathique photographe, (la photo ici, sur la gauche : cliquez dessus pour agrandir, c'est vraiment trop beau...) qui vous fait un portrait censé inaugurer votre anniversaire, mais qui peut également agrémenter votre propre tombe... Le brave homme avait vainement tenté de m'offrir ses services, arguant dans un anglais plus qu'approximatif (Yes mistir, this iz viry bioutifoul for youur fimili...) la finesse graphique et le plaisir oculaire que pouvait procurer la contemplation de ses oeuvres, non encore reconnues, certes, par ses contemporains.

Ici, en Egypte, on aime bien le clinquant : il suffit de monter dans leurs taxis tunés pour s'en rendre compte. Pas un chauffeur qui ne mettra sa touche toute personnelle dans sa peugeot hors d'âge. Alors, à la volée, on constatera la peau de mouton habillant délicieusement l'habitacle. La présence quasiment indispensable de la boite de mouchoirs, parfois plaquée adroitement au plafonnier. Les têtes de mort, très classes, posées sur les petits taquets des portières. Et puis, bien sûr, si l'on peut rajouter des quantités de néons, plutôt roses, pour que ça se voit bien, c'est encore mieux. Pour les vrais amateurs, les têtes d'ours ou de panda, glissées sur les appuis-têtes afin de camoufler sans aucun doute les clients. Enfin, mais là on touche au sublime, la musique bontempi - quatre notes tout au plus - qui se déclenche lorsque le taxi s'arrête. Plaisir auditif garanti. Surtout dans les embouteillages. D'ailleurs, si vous aimez les histoires ahurissantes des taxis, je vous renvoie sur le blog de mon poto Sébastien, lequel a narré avec talent une sortie commune, et notamment les délires d'un chauffeur secoué : http://pharaoblog.blogspot.com/



Mais, là n'est pas vraiment mon propos. Car, figurez-vous que mon collège a reçu la prestigieuse visite de l'ambassadeur de Belgique. Ne soyez pas trop stupéfaits. N'allez pas vous dire : "Comment ? Le collège de François reçoit les plus hautes personnalités du Caire, que dis-je, le gratin (de) cairote !"...
En réalité, au collège, tout est d'abord une histoire d'apparences. J'appris que l'établissement envoyait des quantités d'invitations, et que c'était la quatrième fois que notre ami du plat pays recevait son carton. Jusque là, le brave homme avait décliné... Mais, comme on le sait tous, on finit toujours par céder face à la persistance, voire l'acharnement de certains organismes. Le collège, en ce sens, ressemble un peu aux témoins de Jéovah, qui finissent par rentrer chez quelqu'un de temps à autre, après avoir essuyé 302 refus. Son excellence déboulait Mardi. Dès Lundi, on sentit un vent de panique souffler dans les couloirs de l'établissement. L'ensemble du corps enseignant reçut une note, laquelle nous expliquait que l'ambassadeur allait avoir le tapis rouge, et qu'il allait visiter la classe de quelques privilégiés (malheureusement, je n'ai pas eu la chance des élus... Je suis pas encore upper class au collège !). Comme d'habitude, une petite bonne femme circula parmi les profs, afin de faire signer cette si importante circulaire. Et, on pouvait au lire au bas de la page, une petite note adressée à une enseignante de Techno : on la priait de cesser son bordel pendant la visite d'Illustrissime... Sympa.
Pendant toute la journée du Lundi, des cohortes de pions et de responsables, intervinrent dans ma classe. Les mômes se devaient d'être en tenue complète. Je rappellais, avec délice, à mes chères têtes brunes, de ne pas omettre ses chaussettes floquées du nom du collège (si, si, je vous jure que c'est authentique !)...

Enfin, arriva le Mardi. Je n'avais pas cours de 8 à 9, et pus tranquillement passer en revue l'état de mon lieu de travail, accompagné d'un collègue belge (Je vous passe l'arrivée d'un camion-benne qui déchargea une table dans la cour, ou de la consciencieuse préparation d'un marron glacé - j'ai bien dit UN-, événements quasi indescriptibles tant ils sont absurdes...). Dans les classes où devait se pointer l'ambassadeur, on avait mis des livres. Mais, attention, avec les tranches colorées, pour qu'on les voit bien. Les bouquins avaient été trimballés à la va vite de la bibliothèque, mais qu'importe. Sur les murs des couloirs, jusque là encore nus, on avait plaquardé des panneaux, tous plus beaux les uns que les autres. De mémoire, s'étendait en lettres épaisses des slogans glorieux, décrivant nos élèves : "Communicateurs, ambitieux, ouverts". Ah ! C'était presque aussi beau qu'une campagne du PS... Clou du spectacle, maintenant. A midi, le collège avait organisé un pot, en l'honneur de la visite du Belge. On aurait cru que l'ensemble du personnel allait être invité... Que nenni ! Seuls les profs belges, et les chefs de département, reçurent le droit de participer ! Résultat, les honteux Français et les misérables Egyptiens mangent leurs sandwichs à l'étage, tandis que les honnêtes gens font bombance en bas.

"Maalesh", comme disent les Arabes : j'ai loupé les Ferrero !!!

1 commentaire:

Emmanuelle... a dit…

De l'absurde au sublime, il n'y a qu'un pas!!!cependant, il faut avoir l'oeil exercé (comme le vôtre..)pour le discerner.!!..