Jeudi soir. Le jeudi est un jour important... c'est notre vendredi. Fin de la semaine, cerise enfin décrochée. Bon, en gros, faut décompresser façon solide, genre ça pique et faut qu'ça saigne. J'ai un véritable atout pour aborder ces soirées par rapport à mes chers collègues : j'ai mon jeudi après-midi. Habituellement, je regagne assez vite mes appartements, après avoir englouti un traditionnel plat de pâtes. Et puis, en songeant que d'autres font courageusement face à la fatigue de nos élèves et doivent aller chercher en eux désespérément un fond d'énergie, je m'endors paisiblement. La sieste, rhâââ... Que cette demi-heure est agréable. Après une bonne petite douche, les coups de fil afin de planifier la soirée, j'attends les 20 heures, saute dans un taxi, et la nuit commence.
Jeudi dernier, donc. Une belle soirée, qui se déroula selon un triptyque bien connu, le schéma assez récurent mais qui satisfait globalement : apéro à Zamalek, resto à Mohandesseen, et fin de partie au casino de l'Hilton. Retour à l'appart' quand le carrosse était devenu depuis fort longtemps citrouille. Avant de se coucher, un litre de flotte, en caleçon sur le balcon, histoire de célébrer les souvenirs d'une chiraquie au fort de Brégançon... Bien. Mais, le corps réclame alors de se purifier. Notamment parce que l'atmosphère cairote n'est pas exactement celle que je respirais à Volvic. En même temps, à Volvic, c'est un peu "Into the Wild"...
Le lendemain matin, Cécile - prof d'Arts plastiques, saltimbanque, donc - et mon auguste personne avions décidé d'aller nous baigner. Mais, comme mon aventure égyptienne touche à sa fin, j'avais suggéré d'aller tester une fameuse piscine qui fait face aux pyramides. "Siècle" trouva l'idée bonne (Ah oui, faut expliquer qu'au collège nous devons signer un registre de présence. Or, nos prénoms sont parfois un peu "écorchés". Ainsi, suis-je tantôt "Francé", tantôt "Frona", etc... Mais, celle qui multiplie les coquilles nominatives est Cécile. Elle cumule donc les "Cécéle", "Ciècle", etc... Résultat, nous l'avons affectueusement surnommée "Séquelles". Je sais, on est sans pitié...). Donc, je rejoignais Cécéle au métro de Gizeh, et nous filâmes jusqu'au prestigieux hôtel, le "Mena House". Malheureusement, la piscine était réservée uniquement aux clients de l'établissement. Nous prîmes cependant le temps de boire un jus d'orange en face de Chéops. "Séquelles" entama alors une discussion sur les piscines des grands hôtels, et souligna que lorsqu'elle était à Louxor, elle aurait très bien pu se baigner n'importe où, tout simplement parce qu'on se fondait dans le décor. Et me reprocha de ne pas avoir joué le jeu au Mena House...
Je savais qu'un autre hôtel avait une piscine donnait sur les tombeaux des pharaons. Nous gagnâmes donc l'endroit. Vaste pelouse. Joli bassin. Pyramides. On cherche un responsable. Un jeune homme nous reçoit dans le club de sport, adjacent à la piscine. Anglais peu courant, accent mêlant celui d'un indien de Bombay et d'un berger du Larzac.
- "Vat dou you want tou dou ?"
- "Swim !"
-"Oké... Vat dou you want ?"
- "Nager ?"...
- ...
- "Moumkin swim ?" (Moumkin signifie en arabe : "Est-il possible de"...)
- "Oké, oké. Coume wive mi".
Nous le suivons, un peu étonnés. Il nous ramène à la piscine, et nous montre des petites cabanes, afin que nous nous changions. Malheureusement, les portes sont fermées. Séquelles hoche la tête. Son plan n'a donc pas fonctionné ? Que si ! Le jeune homme revient vers nous en courant, afin de nous ouvrir les cabines. Je demeure interdit. Bon, on paiera à la sortie alors...
Après-midi piscine donc. Alors que nous nagions, on vit une inscription collée contre un des murs de la piscine, signifiant que la piscine était réservée aux clients de l'hôtel. Tant pis. On a rien compris, on nous a rien expliqué, on verra bien...
Sieste fort agréable. Les clients, en majorité d'épaisses italiennes, rouges comme des lasagnes, bronzaient dans cette fin d'après-midi. Lorsque nous décidâmes qu'il était temps de rentrer, nous quittâmes tranquillement l'hôtel. Kécile me sourit, afin d'asseoir sa démonstration : personne ne nous demanda quoi que ce soit...
Bon. J'ai un peu honte. En fait... Non, j'ai même pas honte. Mais, que conclure finalement de cette anecdote : que, par ma couleur de peau, j'ai un passeport dans les hôtels.
C'est drôle. Et surtout triste...
samedi 24 mai 2008
jeudi 15 mai 2008
De deux choses l'une, l'autre c'est le soleil...
J'ai pris le large... Je me suis envolé dans une contrée sépia, bordée par les déserts. Je navigue dans cet océan urbain, cahotant dans un enfer de métal et de pierres. Et la poussière, partout, teintant de son pigment de tabac jusqu'aux rétines des visiteurs. J'aime tant cette ville et ses pulsations suraiguës. Les chants des muezzins fendent le ciel épais et se sont enracinés au fond de ma mémoire. Mais, s'il n'y avait qu'une expérience à retenir, un seul souvenir à conserver, ce serait sans doute l'image de deux soleils. Ouais, je reconnais, ça fait un peu météorologue amateur alors que je ne suis même pas le fils naturel de Jacques Kessler...
Simplement, ces deux soleils correspondent à deux moments de ma vie, et se sont gravés très nettement dans ma tête.
Le premier m'est apparu dans le désert à l'ouest du Caire, vers l'oasis de Baharia. Je vous peindrai plus tard les touches anthracites du basalte sur le sable, ou les déhanchements du feu, au rythme des percussions bédouines. Et, sans doute le goût du thé, lorsque vos yeux se plongent dans un profond clair de lune, et que tout, tout est si profondément calme...
Nous traversions en jeep le désert noir, et un immense disque surgit alors des dunes. Le soleil était si énorme que la chaleur me parut soudain secondaire. Entre de hautes roches blanches, le soleil semblait dévorer la terre. On s'arrêta. Le spectacle était simplement prodigieux.
Au cours du mois d'avril, le Caire subit le souffle d'un vent du désert : le Khamsin. En arabe, Khamsin signifie cinquante, comme les cinquante jours pendant lesquels il apparaît. Ce vent n'est qu'un souffle de sable et de poussière, la respiration minérale des solitudes libyennes. Il recouvre alors les murs, les toits et les routes. Et le ciel s'enroule dans des nuages gris. Alors, lorsque ce marchand de sable vous abandonne à la contemplation, le soleil est devenu laiteux. La gamme habituelle des couleurs du monde s'estompe. L'astre est réduit à une simple palpitation blanchâtre.
Le soleil s'est fondu avec la lune, comme disait la chanson...
Simplement, ces deux soleils correspondent à deux moments de ma vie, et se sont gravés très nettement dans ma tête.
Le premier m'est apparu dans le désert à l'ouest du Caire, vers l'oasis de Baharia. Je vous peindrai plus tard les touches anthracites du basalte sur le sable, ou les déhanchements du feu, au rythme des percussions bédouines. Et, sans doute le goût du thé, lorsque vos yeux se plongent dans un profond clair de lune, et que tout, tout est si profondément calme...
Nous traversions en jeep le désert noir, et un immense disque surgit alors des dunes. Le soleil était si énorme que la chaleur me parut soudain secondaire. Entre de hautes roches blanches, le soleil semblait dévorer la terre. On s'arrêta. Le spectacle était simplement prodigieux.
Au cours du mois d'avril, le Caire subit le souffle d'un vent du désert : le Khamsin. En arabe, Khamsin signifie cinquante, comme les cinquante jours pendant lesquels il apparaît. Ce vent n'est qu'un souffle de sable et de poussière, la respiration minérale des solitudes libyennes. Il recouvre alors les murs, les toits et les routes. Et le ciel s'enroule dans des nuages gris. Alors, lorsque ce marchand de sable vous abandonne à la contemplation, le soleil est devenu laiteux. La gamme habituelle des couleurs du monde s'estompe. L'astre est réduit à une simple palpitation blanchâtre.
Le soleil s'est fondu avec la lune, comme disait la chanson...
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