vendredi 25 janvier 2008

La pluie fait des claquettes


La pluie s'est longuement écrasée sur le Caire, cette semaine. Moi, qui suis un amoureux de la pluie, j'en suis resté tout retourné. Voir un ciel gris, dont la couleur n'était pas uniquement due à la pollution, m'a fait un bien fou. J'aime particulièrement le rythme mélancolique que prend une ville nettoyée par des hectolitres de flotte. Mais, ici, contrairement aux villes européennes, habituées à gérer les précipitations, le Caire ne sait comment évacuer ces eaux soudaines. Pas de bouches d'égouts. L'eau demeure stagnante, créant de gigantesques flaques, au milieu des rues. Elle tourne rapidement à la boue, se mélant à la poussière qui infeste le Caire.

Au collège, le phénomène climatique a posé un authentique problème. Pas de toit pour couvrir les halls du bahut. Résultat, une large flaque apparut. Et, on la fit disparaître à l'aide d'un... aspirateur ! Ce qui tend à prouver que les Egyptiens ont l'habitude, très clairement, de la pluie.

Et ça va même plus loin que ça. Les chauffeurs de taxi continuent à laisser inexorablement leurs fenêtres ouvertes. Mais, surtout, ils n'ont pas d'essuie-glaces ! Dès lors, l'un de mes chauffeurs opta pour une conduite sûre. On voit rien dans l'habitacle. Pas de soucis ! On va conduire avec la tête dehors, au travers de la fenêtre, sur l'autoroute. Je reconnais avoir eu quelques sueurs froides...

Lorsqu'on se ballade dans mon quartier un jour de pluie, on se rend compte que rien n'est adapté à la situation. Je m'étais fait la réflexion qu'un marchand de parapluies ferait faillite au Caire. C'est si vrai que, malgré la pluie, les Egyptiens demeurent sereins, ne cherchant même pas à se couvrir. Ils ont sans doute raison, tant la pluie est rare... Mieux vaut accepter avec patience et philosophie. En revanche, comme la pluie avait redoublé de violence, je gagnais un café, au milieu des chichas et des verres de thé. Les cafés n'ont, généralement, pas de portes. On s'assoit à l'intérieur d'une salle plus ou moins vaste, qui est grande ouverte sur la rue. Je commandais un thé. On me l'apporta, et je sombrais dans une rêverie toute égyptienne, serrant entre mes mains le "shay", amer et brûlant. La pluie berce. En France comme en Egypte...

mercredi 16 janvier 2008

Sur la corde raide...


Retour de France, depuis une semaine. Le froid (!) s'est installé sur la capitale égyptienne. Bon, ça reste un froid très relatif. Mais, tôt le matin, les températures doivent monter à 7-8 degrés. La journée tourne autour des 17 - 18. En gros, un mois de Mars français. La nuit, comme l'isolation est un principe totalement abstrait dans l'architecture égyptienne, un vent glacé souffle et s'infiltre entre les murs de l'appart'. Du coup, j'ai enfin essayé la fonction chauffage de la clim'. Je savais pas que ça existait avant de venir au Caire... Et je pensais pas m'en servir un jour. Cependant, quand je vous parle des rigueurs du climat, c'est pas non plus les steppes gelées de la Sibérie septentrionale. Non. Je continue à me vêtir d'une chemise, mais j'enfile le manteau qui me sert seulement l'été et l'automne en France... Donc, on survit.

Lorsque je suis arrivé, j'ai été habité par un curieux sentiment, oscillant entre la nostalgie et un léger bonheur, diffus, presque impalpable. Tout tournait sous mon crâne, à tel point que l'image d'une machine à laver s'est imprimé dans mon esprit. Des quantités de pensées, de souvenirs, se dilataient dans la nuit égyptienne. Dans l'avion qui me ramena, je me retrouvais à côté de Français, un guide du Routard sur les genoux, déjà perdus. J'envisageais le Caire, sans hâte. Je savais ce qui m'attendait. Je négocie mon taxi en Arabe, en hurlant que les tarifs sont bien trop élevés. J'indique les directions au chauffeur pour regagner mon domicile. Bref, j'ai des repères. Un coup de fil à Seb. Les potes sont là. L'épicier aussi, qui me gratifie de son habituel sourire quand je lui décoche une salutation traditionnelle... J'habite en Egypte... Vraiment ? Car, mon retour sur ma terre natale s'est étalé sur 3 semaines. Suffisant pour reprendre les vieilles habitudes et ma vie, codifiée, structurée. Clermont est toujours taillé dans la pierre noire volcanique et je risque pas de me perdre dans les étroites ruelles de la vieille ville. Rien n'a changé. En Egypte, malgré des réflexes, des habitudes, je suis encore sur la corde raide. Je ne parle pas Arabe. La culture, le mode de vie, ne sont pas les miens... Partir revient à se mettre en danger, perpétuellement. J'ai fait éclater un cocon, relativement douillet, afin de voler (de mon propre zèle ?). Mettre la Méditerranée entre Carole et moi, était-ce une erreur ? Un révélateur plutôt. Quand je me baladais dans les rues du Puy ou de Clermont, avec ma chère et tendre pendue à mon bras, je me rendais que ces actes futiles, habituels, devenaient subitement importants. Que le quotidien, ce grand dévorateur de couple, prenait soudainement des teintes dorées. Que mon café sur un comptoir de zinc n'avait pas la même saveur. Alex, philosophe physicien devant l'éternel, m'a dit la semaine dernière que partir permettait d'évoluer. Et, que le but c'était de ne pas habiter quelque part, mais de se sentir chez soi partout. De ne pas avoir peur de l'Autre...

Je crois qu'il a raison. Mais, je suis désormais convaincu que je ne suis parti que dans le but de sentir des frissons me parcourir l'échine... Contempler ma clepsydre s'écouler, et me souvenir, lorsque l'heure sera venue, des étoiles qui brillaient dans une nuit de septembre, allongé dans une felouque, du soleil qui brûle, en Octobre, des pyramides qui se découpent à l'horizon, le matin, et du plaisir si immense que j'avais eu à revoir mes amis, ma famille, ma Carole, un Noël, en France...